« Au Québec, la censure ne meurt jamais », par Jean-Yves Mollier

Actualitté

Par Jean-Yves Mollier
8 avril 2024

« Alors que la France s’apprête à accueillir le Québec au Festival du livre de Paris en avril prochain, et que paraît au même moment une édition revue d’Interdiction de publier. La censure d’hier à aujourd’hui (éditions Double ponctuation, 2024, Prix Charles-Aubert d’Histoire), l’historien spécialiste du livre et de l’édition Jean-Yves Mollier revient sur les différentes formes de censure du livre au Québec. 

[…] À peine délivré de cette chape de plomb religieuse qui avait bridé l’imagination des écrivains de la Belle Province pendant des décennies, le Québec devait s’illustrer par la rigueur de ses procédures bâillons destinées à protéger, non plus l’Église catholique, mais l’économie nationale. Révélée par la publication du livre d’Alain Deneault intitulé Noir Canada. Pillage, corruption et criminalité en Afrique (Écosociété, Montréal, 2008), la « procédure bâillon » canadienne consistait, pour l’entreprise minière Barrick Gold par exemple, à demander six millions de dollars à la maison d’édition si elle s’entêtait à mettre en vente cette enquête sulfureuse. Aux termes d’une longue procédure et au prix d’un arrangement «hors cour», l’éditeur renonça à rééditer le livre, et les deux compagnies minières qui exigeaient désormais onze millions de dollars abandonnèrent leurs poursuites. […] »